Le Peuple de l’État de New York
contre
Dominique Strauss-Khan
Dossier No. 2011 NY 035773
Un article de Joëlle Bailard, J.D., Ph.D.
écrit spécialement pour www.Le-mot-juste-en-anglais.com
Maitre Bailard est avocate et exerce à Los Angeles depuis 1996
- Suite de la deuxième partie
Vous pouvez lire le début de cet article, qui récapitule les faits, en cliquant sur ce lien.
LA LOI
Probable cause
La protection des droits de l’accusé commence et finit avec la Constitution des États-Unis. Concernant l’arrestation, pour être légale, une arrestation doit, selon le 4ème Amendement de la Constitution, être motivée par une « probable cause ». C’est-à-dire que les forces de l’ordre doivent avoir des raisons de croire qu’il est probable qu’un crime a été commis par la personne qui va être arrêtée.
Ici, le 14 mai 2011, les accusations détaillées de Madame Diallo donnaient à la police de la Ville de New York une raison suffisante pour arrêter DSK.
« Vous avez le droit de garder le silence… »
En ce qui concerne le domaine des preuves admissibles, le 5ème Amendement de la Constitution garantit en outre qu’un accusé ne peut être forcé de témoigner contre lui-même. D’où, lors d’une arrestation et pendant les interrogations qui suivent, les précautions de la police avec lesquelles sont familières toutes personnes qui regardent des films américains portant sur une action pénale « Vous avez le droit de garder le silence. Tout ce que vous direz pourra être et sera utilisé contre vous…. » Miranda contre l’État d’Arizona (1962)
Pour le Peuple de l’État de New York contre DSK, après que DSK a plaidé non coupable et n’a rien dit qui aurait pu être utilisé contre lui dans les poursuites sur ces crimes allégués, en l’absence d’autres témoins de ces crimes allégués, le bureau du procureur se retrouve avec un seul témoin à charge : la victime alléguée.
Au-delà d’un doute raisonnable
Les fonctions du bureau du procureur consistent, d’une part, à assembler les preuves contre l’accusé et, d’autre part à persuader ensuite la majorité du jury qui a été assemblé pour décider de la culpabilité ou non culpabilité de l’accusé que les preuves constitutionnellement admissibles que le bureau du procureur a présentées à ce jury établissent au-delà d’un doute raisonnable (« beyond a reasonable doubt ») que l’accusé a commis le crime pour lequel il est devant la justice.
Le 6ème Amendement de la Constitution des États-Unis
Le droit à un procès par un « jury de ses pairs », qui surprend en France, est garanti à l’accusé par le 6ème Amendement de la Constitution :
« In all criminal prosecutions, the accused shall enjoy the right to a speedy and public trial, by an impartial jury of the State and district wherein the crime shall have been committed, which district shall have been previously ascertained by law, and to be informed of the nature and cause of the accusation; to be confronted with the witnesses against him; to have compulsory process for obtaining witnesses in his favor, and to have the Assistance of Counsel for his defence. »
Dans toutes poursuites criminelles, l’accusé aura le droit à un procès rapide et public, par un jury impartial de l’État et du district où le crime aura été commis, ce district ayant été auparavant déterminé selon la loi, et d’être informé de la nature et de la cause de l’accusation, de confronter les témoins contre lui, d’avoir un processus obligatoire pour obtenir les témoins en sa faveur, et d’avoir le l’assistance d’un Conseil pour sa défense.’
La Constitution des États-Unis prévoit ainsi pour la protection de tout accusé cette autre mesure importante : le 6ème Amendement garantit à l’accusé le droit de confronter son accusateur.
D’où les problèmes pour le procureur quand les recherches de son propre bureau sur Madame Diallo comme partie de sa préparation pour le procès commencent à indiquer que la crédibilité de la victime présumée est moins évidente qu’elle ne le paraissait au premier abord.
Dans cette préparation complexe dont l’objectif pour les défenseurs et pour le procureur est de voir que justice se fasse, les devoirs du procureur incluent qu’il fasse connaître aux défenseurs les faits qu’il découvre pendant ses recherches qui sembleraient indiquer que l’accusé pourrait être innocent.
Ici, fin juin 2011, c’est de cette partie de ses devoirs que le procureur Cyrus Vance commence à s’acquitter quand, après avoir commencé à développer des doutes sur la sincérité de son unique témoin, il demande une audience d’urgence pour le 1er juillet qui a résulté en la remise en liberté provisoire de DSK.
Les évènements qui suivent en juillet 2011 à l’initiative de la victime présumée et de ses avocats n’ajoutent rien qui aurait pu redorer sa crédibilité : pendant même que l’affaire en pénal se poursuit, Madame Diallo dépose le 8 août une action civile contre DSK ayant pour objet d’obtenir contre lui des dommages et intérêts, suggérant que les défenseurs de DSK n’ont peut-être pas tort quand ils maintiennent depuis le début que l’objectif de Madame Diallo dans cette affaire contre DSK est un objectif financier.
Le fait pour la victime présumée d’agression sexuelle de passer à la télévision dans les jours précédant la prochaine audience dans l’affaire en pénal contre DSK n’arrange rien non plus pour le cas du procureur : après que son bureau a été amené à consacrer des ressources considérables dans le but de faire obtenir justice à Madame Diallo, il voit Madame Diallo, son seul témoin, perdre son focus concernant l’affaire pénale.
Quoi que veuille laisser entendre l’avocat Kenneth Thompson, une affaire criminelle n’est pas décidée par les médias, mais par un jury.
Pour cette raison, le procureur doit maintenant ajouter à la liste des éléments à décharge que Madame Diallo a choisi de passer à la télévision parler en détail des faits qu’elle reproche à DSK et des blessures et autres préjudices qu’elle aurait subis de la part de DSK. Cette interview télévisée ni celle accordée à Newsweek ne pourrait être très persuasive pour le jury en Cour pénale en ce qui concerne la crédibilité de l’unique témoin.
Finalement, dans une affaire en droit pénal, obtenir justice ne veut pas dire obtenir des dollars.
Après que le bureau du procureur est informé que les avocats de Madame Diallo ont en plus entretenu en juin 2011 des discussions secrètes avec les avocats de DSK dans le but d’obtenir un règlement amiable financier, que reste-t-il de la crédibilité de la victime présumée ?
Aurait-il été raisonnable, en août 2011, pour le procureur Vance de croire que la majorité d’un jury, après que Madame Diallo aurait été confrontée aux questions des défenseurs de DSK informés des évènements auxquels elle avait choisi de participer depuis juin 2011 dans un but lucratif, aurait voulu sur la base de ce témoignage de Madame Diallo conclure que DSK était coupable au-delà d’un doute raisonnable ?
Le Juge Obus a conclu le 23 août 2011 que la motion de recommandation de rejet des charges contre DSK logée par le procureur le 21 août 2011 était raisonnable : affaire classée.
LES OPTIONS DE DSK
Maintenant que le juge Obus a confirmé ce mardi 23 août que les poursuites intentées en mai 2011 contre DSK par l’État de New York suite aux accusations contre lui de Nafissatou Diallo ont été abandonnées, DSK est à nouveau libre de ses actes. Cette affaire étant maintenant classée, DSK a devant lui un certain nombre d’options concernant les USA :
Option 1 : Rentrer à Paris. Et tourner la page sur ce chapitre de sa vie de diplomate aux USA ; Ou
Option 2 : Dans les 365 jours qui suivent, loger à New York une action civile contre son accusatrice. Éléments possibles d’une telle action civile : atteinte à sa réputation, dommage à sa carrière, pertes de salaire, tentative d’extorsion, …
Option 3 : Dans les 365 jours qui suivent, loger à New York une action civile contre l’avocat de son accusatrice. Éléments possibles d’une telle action civile : voir Option 2 ci-dessus.
Références
En plus des informations données par la police de New York et le bureau du procureur de l’État de New York, le résumé des faits présentés ci-dessus s’est appuyé sur le reportage sur trois mois, « grâce à des sources bien informées », par la presse et les médias, dont Libération et AFP en France, et de nombreuses sources aux États-Unis, y compris AOL, Newsweek et ABC
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