Souvenez-vous, c’était la fin des années 50. La France, la vraie, la profonde, la « franchouillarde », celle du Piconbière et des congés payés a la « gueule d’atmosphère » se réveilla un beau matin de nouveau sous la botte ou plutôt, le chapeau melon de l’envahisseur : les FRANGLAIS avaient débarqué sur leurs yachts, envahissant notre douce France, détruisant tout sur leur passage a coups de bulldozers, violant a coups de sex-shops, embrochant la poule au pot a coups de barbecues, submergeant a coups de hot dogs les cafés du commerce qu’ils allèrent jusqu'à transformer en drugstores.
Monsieur Dupont-Durand était effondré. Il n’en croyait pas ses oreilles. Certes, il avait fini par s’habituer sans problème au chewing-gum des GI’s libérateurs, ceux-là même qui dansaient le be-bop le week-end dans les dancings, mais la, il ca devenait too much. Jamais la France n’avait été aussi humiliée par la perfide Albion depuis Jeanne d’Arc et Napoléon
Heureusement, en 1964, la contre-attaque apparut sous la plume féroce d’Etiemble et son célèbre Parlez-vous franglais ?, terrible réquisitoire contre l’envahisseur. Il fut soutenu dans son courageux combat par l’inoubliable Fernand Reynaud et son Restons français ! Grace à ces farouches chevaliers, l’ennemi parut reculer mais en 1970 une nouvelle brèche apparut dans l’univers impitoyable du showbiz et du marketing ou les meetings succédaient aux brainstormings, les box-offices aux hit-parades.
C’en était trop! Le gouvernement français prit lui-même les choses en main, faisant voter une loi qui, en 1977, interdit l’usage des mots anglais dans le vocabulaire officiel, transformant pêle-mêle bulldozer en bouteur, marketing en mercatique, l’interview du speaker en entretien de l’annoncer et le container en conteneur.
Mais c’était trop tard ! La « franglisation » avait atteint son point de non-retour et personne ne pouvait plus empêcher monsieur Dupont-Durand de faire son jogging autour du parking. Même Monsieur Robert, celui du dictionnaire, continuait de définir tranquillement dans son vénérable ouvrage une personne « sexy » comme « ayant du sex-appeal. » C’était un comble !
Mais était-ce donc si grave ? Ne valait-il pas mieux en rire ? Apres tout. Notre vaillant pays en avait vu d’autres et, comme chacun sait en France, si on n’a pas de pétrole et encore moins de vocabulaire, on a des idées et encore plus d’humour. Puisque l’anglais était là, on allait le cuisiner a la française et se mitonner suivant une recette dont je vous livre le secret :
« Prendre un mot français, normal, au sens propre ou au sens figure suivant la saison et les arrivages.
Chercher sa traduction littérale. Si l’on en trouve plusieurs, faire un choix arbitraire.
Introduire ce mot dans une location courante (proverbe, expression officielle ou familière, citation, etc.) Si l’on aime les plats relèves, ne pas hésiter à parsemer d’argot.
Traduire la location entière mot a mot.
Servir. »
Voila, j’ai passé ces dernières années à élaborer et à tester patiemment, dans l’ombre de mon laboratoire, des recettes de cette nouvelle gastronomie. Celle qui me parait la plus succulente a donné son titre a ce livre…
Quant aux autres, je vous laisse juger…
A la bonne votre ! (At the good yours !)
Jean-Loup Chiflet John-Wolf Whistle
Les expressions idiomatiques ne se traduisent pas littéralement : des exemples recueillis du livre de Jean-Loup Chiflet
Idiome français |
Traduction littérale (qui n’a aucun sens) |
Idiome anglais équivalant |
être aux abois |
To be at the barks |
To be at your last gap |
tenir l’affiche |
To hold the poster |
To have a long run |
passer du coq a l’âne |
To pass from cock to donkey |
To change the subject |
Filer a l’anglaise |
To spin at the English |
To take French leave |
Dans le plus simple appareil |
In the plainest camera |
In your birthday suit |
Travailler d’arrache-pied |
To work of pull out foot |
To work like a navvy |
Ne pas être dans son assiette |
Not to be in one’s plate |
To be out of sorts |
Nous ne sommes pas sortis de l’auberge |
We are not out of the inn |
We are not out of the wood |
En deux coups de cuillère à pot _ In two shakes of a lamb's tail
Rédigé par : Emile Scyeur | 12/08/2023 à 03:45