Il y a deux ans, nous avons publié un article intitulé: « Il y a 70 ans – le 18 juin 1940 : l'appel à la résistance du général de Gaulle ». Cette année, le 18 juin prend un autre sens, celui du bicentenaire de la déclaration de guerre des États-Unis à la Grande-Bretagne, en 1812.
Une guerre limitée mais âpre qui a forgé le destin d'un continent...
Le 18 juin 1812, les États-Unis déclaraient la guerre au Royaume-Uni et au Canada britannique. La Chambre des Représentants l'avait décidée 79 voix pour contre 49. Au Sénat, la décision avait été prise par 19 voix contre 13. Les Fédéralistes (39 en tout) avaient tous voté non. On l'appela « la guerre du Président Madison ».
Le Président James Madison
Les causes en étaient l'enrôlement forcé de marins américains dans la marine britannique, l'interruption du commerce américain avec la France, le soutien britannique aux raids indiens dans le Nord-Ouest et le Middle West américains, et l'expansion américaine au Canada.
La guerre s'acheva le 18 février 1815. Les Britanniques et leurs alliés avaient battu Napoléon qui languissait à l'île d'Elbe. À la fin des hostilités, les frontières du Canada et des États-Unis étaient fixées et toutes les parties avaient le même territoire qu'auparavant. Pour les Britanniques, c'était une victoire. Le blocus de l'Europe avait réussi et Napoléon était défait. Les Canadiens aussi avaient gagné: les États-Unis ne leur avaient rien pris. Pour les citoyens américains, c'était un succès. Leur marine s'était illustrée et ils avaient mené une « deuxième guerre révolutionnaire ». Certes, la Maison blanche avait été incendiée, mais les Américains avaient arrêté les Britanniques à la Nouvelle-Orléans, dans les Grands Lacs, à Baltimore et à New York. Du côté américain, on déplorait 2.260 morts et 4.505 blessés, tandis que les Britanniques avaient eu 1.600 morts et 3.679 blessés.
La guerre produisit la Bannière étoilée, une nouvelle marine plus puissante, et le général Andrew Jackson, le héros des combats de la Nouvelle-Orléans, qui sera plus tard le premier Président originaire de l'Ouest.
Andrew Jackson
La guerre donna au Canada son statut actuel de nation distincte et ruina la possibilité pour les Indiens d'Amérique d'avoir une terre à eux. Les Britanniques les avaient soutenus contre les Américains, mais ils les lâchèrent dès que le traité de paix eût été signé. Ils furent les vrais perdants de la guerre.
Pour les Britanniques, cette guerre était un dérivatif. Le principal objectif était de battre Napoléon et c'est tout ce que les historiens britanniques jugent pertinent.
En juin 2012, les Britanniques écriront peu sur le sujet, et seule la ville de Baltimore s'en préoccupera vraiment. L'école navale américaine d'Annapolis (Maryland) organisera une cérémonie en l'honneur de la véritable création de la marine des États-Unis ainsi qu'à la mémoire de quelques-uns des grands marins de la guerre de 1812.
David Hirsch et Jean Leclercq
Glossaire anglais-francais du blog :
battle |
bataille |
blunder |
bourde |
bombardment |
bombardement |
empressment |
enrôlement forcé |
independence |
Indépendance |
inflame |
enflammer |
invader |
envahisseur |
mortar |
mortier |
navy |
marine |
pandemonium |
tohu-bohu |
plunder |
pillage |
power |
puissance |
redcoat |
soldat anglais |
revenge |
revanche |
rifleman |
fusilier |
sailor |
marin |
sniper |
tireur embusqué |
(to) burn down, to torch |
Incendier |
Note historique supplémentaire :
Lorsqu'il est question de 1812, le théâtre européen retient bien davantage l'attention que la guerre américaine. Dans la mémoire collective, ce millésime est plus volontiers associé à la bataille de Borodino, à l'incendie de Moscou et à la retraite de Russie qu'au sac de Washington par les Royal Marines (en août 1814). Pourtant, d'aucuns considèrent ces trois années d'hostilités comme la deuxième manche de la Guerre d'Indépendance. De même qu'on veut parfois voir dans la capitulation de Yorktown, la revanche de la prise de Québec, certains accordent à la guerre de 1812 davantage d'importance qu'elle n'en a vraiment eue. Pour les Américains, c'est effectivement une confirmation de l'indépendance arrachée à l'ancienne métropole et l'affirmation de leur puissance navale. Après en être venus aux mains, il faut savoir faire la paix. À ce sujet, nous avons vu qu'Albert Gallatin avait très habilement conclu le traité de Gand en négociant un statu quo ante bellum qui ménageait toutes les parties prenantes. Pour les Canadiens, c'est effectivement la naissance d'un sentiment national, face à l'invasion par le Lac Champlain et dans la région des Grands Lacs. Motif de satisfaction supplémentaire pour l'autorité coloniale, c'est une Canadien français, Charles-Michel d'Irumbéry de Salaberry, qui arrête les envahisseurs américains. Signe aussi que la politique adroite de George III à l'égard des Canadiens français porte ses fruits. Il faudra cependant attendre 1867 pour que le Canada accède à l'autonomie. Les seules victimes, les dindons de la farce, sont les Indiens qui, refoulés toujours plus loin vers l'ouest par la pénétration de l'homme blanc, ont un moment cru pouvoir constituer une nation indienne dans la région des Grands Lacs. Ils sont les oubliés de la paix de Gand. Comme leurs frères métis de la Rivière Rouge, ils ne renonceront pas totalement et, du côté canadien, le projet de nation métis survivra jusqu'à la fin du siècle, c'est-à-dire jusqu'à ce que leur chef, Louis Riel, soit jugé et pendu à Regina, en 1885.
Signature du traité de Gand. L'amiral de la Flotte, James Gambiens, serre la main de l'ambassadeur des États-Unis en Russie, John Quincy Adams. À côté de l'ambassadeur, notre vieil ami Albert Gallatin, l'artisan de ce traité.
200 ans plus tard :
,,,au cours de la visite récente du Premier Ministre britannique à Washington, nous avons cité quelques-uns des propos qu'ils ont échangés sur la pelouse de la Maison Blanche, lors d'une conférence de presse.
C'est le Président Obama qui a rappelé l'incendie de Washington par les troupes britanniques, au cours duquel la Maison Blanche et plusieurs autres édifices gouvernementaux ont été incendiés (un épisode de la guerre qui, en fait, a eu lieu en 1814) :
Obama : "It's been 200 years since the British came here to the White House under somewhat different circumstances. They made quite an impression. They really lit up the place. But we moved on."
Cameron : "I am a little embarrassed as I stand here to think that 200 years ago my ancestors tried to burn this place down. Now looking around me I can see you've got the place a little better defended today. You're clearly not taking any risks with the Brits this time."
Livres :
The War of 1812 in the Age of Napoleon by Jeremy Black
Publisher: University of Oklahoma Press (December 16, 2009)
The War of 1812: Conflict for a Continent
(Cambridge Essential Histories) by J.C.A. Stagg
Publisher : Cambridge University Press (March 12, 2012)
Lecture supplémentaire :
Guerre de 1812 - Un illustrator refuse de cautionner les distortions historiques des conservateurs
LE DEVOIR.COM - Libre de penser (Canada)
Une émeute contre la conscription en 1812
LE DEVOIR.COM - Libre de penser (Canada)
1812 (American Story) :
Part 1 :
Part 2 : http://www.youtube.com/watch?v=In8ehVBhFCQ
Part 3 : http://www.youtube.com/watch?v=A2sXXwIEhsQ
Part 4 : http://www.youtube.com/watch?v=dmN0NA0pRs0
Part 5 : http://www.youtube.com/watch?v=1P4oubQHCVY
Part 6 : http://www.youtube.com/watch?v=SxmjD8KAl7s
Part 7 : http://www.youtube.com/watch?v=nN-ldd5lYmU
Part 8 : http://www.youtube.com/watch?v=qjl10p7EQ1k
Part 9 : http://www.youtube.com/watch?v=nHfuZ1X-z3k
Part 10: http://www.youtube.com/watch?v=vD_H_T65ilA
...et 4 jours plus tard, Napoléon lançait la campagne de Russie... Personne pour "twitter" l'info à l'époque...
Rédigé par : Catherine | 15/06/2012 à 14:56