Le mois dernier, la Radio publique national des États-Unis (NPR) a diffusé une emission intitulée « A Lost And Found 'Wonder': Pearl S. Buck's Final Novel ». Nous avons demandé à M. Laurent Bury, Professeur de littérature anglaise du XIXème siècle à l'université Lumière - Lyon 2, auteur de « Civilisation britannique au XIXe siècle » (2001), spécialiste de la littérature britannique et traducteur de biographies de Lewis Carroll et de Virginia Woolf et de plusieurs autres livres, de bien vouloir traduire le bref contenu de cette émission. M. Laurent a eu la gentillesse d'accéder à notre demande. Voici son texte.
Le programme original en anglais se trouve à ce lien en format sonore et écrit.
Pearl S. Buck devint en 1931 une star de la littérature lorsqu’elle fit paraître un livre intitulé La Terre chinoise. Ce récit de la vie familiale dans un village chinois valut à la romancière une renommée internationale, le prix Pulitzer, et finalement le prix Nobel. Fille de missionnaires américains, elle avait grandi en Chine, ce qui lui inspira ce roman et bien d’autres ; à sa mort en 1973, Buck avait écrit plus de cent livres, dont quarante-trois romans.
En décembre dernier, son fils Edgar Walsh, qui gère son fonds littéraire, reçut un courriel annonçant une nouvelle inattendue : un 44e roman de sa mère avait été découvert au Texas.
« Quelqu’un, et j’ignore qui, avait pris le manuscrit dans la maison où ma mère est morte, dans le Vermont, et avait disparu avec le roman, déclare Walsh. La personne en question est arrivée au Texas, a loué une unité de stockage et y a déposé le manuscrit. Et c’est là qu’on l’a retrouvé ».
La famille a connu des moments difficiles, avoue-t-il à Jacki Lyden, de NPR, mais tout s’est arrangé ces derniers temps. L’œuvre de sa mère a connu un regain d’intérêt en 2004, quand Oprah Winfrey a choisi La Terre chinoise pour son club de lecture.
Walsh ignorait que Pearl Buck avait consacré ses dernières années à écrire ce roman, intitulé Le Miracle éternel.
« Et je ne savais absolument pas que quelqu’un avait dérobé le manuscrit de la maison du Vermont où elle avait vécu ses dernière années, pour nous le cacher pendant quarante ans, à la famille et à moi ».
Deux manuscrits du roman ont été retrouvés, l’un tapé à la machine, l’autre écrit à la main par l’auteur. Par chance, dit Walsh, le fonds littéraire a pu acquérir les deux sans trop de difficultés.
« J’ai contacté un avocat à Philadelphie, Peter Hearn [Hearn avait aidé Walsh à régler d’autres litiges concernant les œuvres de Pearl Buck]. Je lui ai dit : ‘Nous lui donnerons pas à cette femme ce qu’elle demande, mais nous lui verserons une somme raisonnable et nous exigerons que le texte nous soit immédiatement restitué’. Ça a marché ».
Peu après l’avoir reçu, Walsh a lu le manuscrit, qui a provoqué en lui une « réaction complexe ».
« C’était fascinant, sincèrement, de lire son dernier roman tout en prenant conscience qu’il s’agissait, en un sens, d’un événement historique. Je pensais à cette femme qui avait 78 ou 79 ans alors qu’elle écrivait ce texte. Elle savait qu’elle allait bientôt mourir, mais elle a tout simplement pris sa plume pour écrire plus de 300 pages. Un incroyable tour de force ».
Le roman retrace le parcours de Randolph Colfax, un « génie », selon Walsh, « depuis sa naissance, en passant par sa carrière dans l’armée, jusqu’à sa liaison avec une femme plus âgée, à Londres, puis à Paris où il fait la connaissance d’une jeune Chinoise. C’est une exploration très personnelle, en fiction, des thèmes de la tolérance et de l’humanité qui ont toujours irrigué le travail de Pearl Buck ».
Walsh déclare n’avoir eu aucun mal à décider de publier ce roman. Le Miracle éternel paraîtra en octobre prochain.
Lecture supplémentaire :
What the Remarkable Legacy of Pearl Buck Still Means for China
The Atlantic, August 9, 2012
Deux maitres du langage conjuguent leurs habilités linguistiques pour éclairer
un âge obscur
Le Mot Juste, 21 octobre 2010
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