Maurice Ravel fêta son 53ème anniversaire - le 7 mars 1928 - à New York, lors d’une réception donnée en son honneur par la cantatrice canadienne mezzo-soprano Eva Gauthier. Parmi les invités se trouvait George Gershwin, alors âgé de 29 ans. Pendant cette réception, Gershwin produit une grande impression sur Ravel par une exécution impromptue de « Rhapsody in Blue » et «The Man I Love ». Ravel avait visiblement un tel respect pour le don inné de la mélodie chez Gershwin que quand ce dernier lui demanda des leçons de composition, il refusa sa requête, lui disant: «il vaut mieux écrire du bon Gershwin que du mauvais Ravel, ce qui adviendrait si vous travailliez avec moi». Leur mutuelle admiration devait trouver un curieux parallèle dans les circonstances de leur mort - à cinq mois d’intervalle – et moins de 10 années plus tard. Gershwin mourut le 11 juillet 1937, à la suite d’une opération sur une tumeur au cerveau, tandis que Ravel, qu’un trouble neurologique dit «démence de Niemann-Pick » faisait décliner de jour en jour, mourut le 28 décembre de la même année, des suites d’une opération du cerveau qui, elle aussi, avait échoué.
Maurice Ravel (1875 - 1937) |
George Gershwin (1898 - 1937) |
Le jour qui suivit cette rencontre, Ravel dirigea l’Orchestre Symphonique de New York au Carnegie Hall. Il conclut ce programme avec La Valse, une œuvre dont la première new-yorkaise avait été donnée au Hall en 1922 par l’orchestre Philharmonique de New York sous la direction de Willem Mengelberg. Comme c’est le cas de beaucoup des compositions de Ravel pour grand orchestre, La Valse avait débuté comme œuvre pour piano solo, et en 1927, le pianiste Dmitri Tiomkin en exécuta la version originelle pour sa première audition américaine au Carnegie Hall.
Bien que la tournée de Ravel en 1928 eût été sa seule visite en Amérique, marquée par un unique concert au Carnegie Hall, il assista aussi à un concert donné de ses œuvres au Hall par Serge Koussevitzky, director de la prestigieuse Orchestre Symphonique de Boston le 7 janvier 1928. Le programme - qui incluait Daphnis et Chloé, Suite pour orchestre N.2 - enchanta tellement son public qu’«il fut obligé de paraître sur scène» fit-il remarquer à son frère Edouard. Ravel avait été ravi de voir l’auditoire tout entier «debout, pour une prodigieuse ovation, mêlée de sifflets d’enthousiasme».
En totalité, plus d’une douzaine de compositions de Ravel eurent leur première audition au Carnegie Hall. C’est là que la première du Concerto en sol majeur fut présentée à New York, par le pianiste Sylvan Levin et l’Orchestre de Philadelphie, comme les premières de Boléro et du Concerto pour la main gauche, ainsi que les premières américaines de Alborada del Gracioso et Don Quichotte à Dulcinée, qui toutes eurent lieu au Carnegie Hall.
Source: When Ravel Met Gershwin,
Carnegie Hall Blog, April 9, 2012
Jonathan Goldberg & Michèle Druon
Lecture supplémentaire :
Misunderstanding Gershwin
The Atlantic, 1998
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