Le Palais de Buckingham se propose d'engager un(e) assistant(e) aux tâches domestiques (housekeeping assistant), mais pas n'importe qui, et assurément pas n'importe quel(le) technicien(ne) de surface, comme le français hexagonal désigne désormais les trop prosaïques « femmes (hommes) de ménage ».
L'offre d'emploi est ainsi libellée :« Il ne s'agit pas de tâches ménagères classiques. Vous travaillerez et vivrez dans un cadre historique extraordinaire, en faisant en sorte qu'il se présente sous ses plus beaux jours à vos collègues, aux visiteurs et, bien sûr, à la famille royale. »
En gras, l'annonce vante le caractère prestigieux des lieux où s'exerceront les fonctions : « Vous éprouverez le fierté de vous trouver dans l'un des lieux les plus célèbres du monde ». Mais, c'est en maigres que suit la description des tâches : « Vous nettoierez et entretiendrez les intérieurs, brosserez les tapis et épousseterez des meubles, mais aussi des vases anciens et des tableaux irremplaçables ». Bref, finies les paillettes, à vos chiffons !
L'heureux(se) élu(e) devra être quelqu'un « qui ait le souci et l'orgueil de son travail, tout en possédant un sens aigu de la communication et de la gestion du temps. » Aucune expérience n'est exigée, mais l'annonce précise que, « sans être indispensable, une expérience des tâches ménagères et de l'accueil constituerait un atout. » La rémunération sera de près de 16.755£ par an (logé et nourri), auxquels s'ajouteront de nombreux avantages annexes dont 33 jours de congés annuels.
Cette annonce serait passée inaperçue n'était-ce une petite faute de grammaire qui jette un doute sur la valeur actuelle du Queen's English, la langue du Palais ayant toujours été considérée comme l'étalon-or du bien parler anglais. En effet, s'agissant des lieux historiques en question, l'offre d'emploi précise : ensuring that they are presented to their best, alors qu'il aurait fallu écrire : at their best. Certes, le délicat usage des postpositions est l'un des écueils de la grammaire anglaise, mais on aurait pu s'attendre qu'il soit maîtrisé par la surintendance du Palais de Buckingham.
Pour eux aussi...
Mais, trois ministres du nouveau gouvernement britannique de Mme Theresa May (tous partisans d'une sortie de l'UE) vont également connaître la vie de château. En effet, MM. Boris Johnson, le bouillant Ministre des affaires étrangères, David Davis, Secrétaire au Brexit, et Liam Fox, Secrétaire au commerce international, vont se partager les 115 pièces du manoir de Chevening (Kent).
Cette vénérable bâtisse du XVIIe siècle, qui appartint longtemps aux comtes de Stanhope, se trouve au centre d'un vaste domaine s'étendant de Seven Oaks à Biggin Hill, l'aérodrome mythique de la bataille d'Angleterre. Elle est flanquée de deux tours qui ont été vite baptisées Brexit Towers, en ce sens qu'elles seront le quartier général officieux des ministres dits Brexiters, lesquels veilleront à ce que Mme May tienne parole : « Brexit means Brexit ».
D'aucuns ont voulu y voir un clin d'œil aux Fawlty Towers [1] , la série télévisée en 12 épisodes, conçue et interprétée par John Cleese et Connie Booth, diffusée par BBC2 en 1975 et 1979. L'action, qui se déroule dans un hôtel de la station balnéaire de Torquay, est une suite de situations burlesques où interviennent des propriétaires excentriques et farfelus (Basil et Sybil Fawlty), une femme de chambre pleine de bon sens (Polly) et un serveur-maître Jacques espagnol (Manuel), véritable souffre-douleur de son patron. Gageons qu'il n'en sera pas de même à Chevening Mansion !
Lecture supplémentaire :
Windsor Castle: Changing hundreds of royal clocks
BBC News – 23.10.2020
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