Le texte qui suit est une version abrégée d'un article qui parut sur le site de la BBC, traduit par Francoise Pinteux-Jones.
L’exposition courante de la British Library de Londres, ouverte au grand public jusqu'au 27 août, 2019, est extraordinairement ambitieuse. Writing: Making Your Mark [1] recense la progression et la variété des griffonnages humains de par le globe sur une période de 5000 ans au travers de 40 systèmes et 100 objets. L’expo nous transporte des cunéiformes gravés dans les tablettes d’argile de Mésopotamie à l’évanescente communication numérique des temps présents.
La Sutra du Diamant est le plus ancien ouvrage imprimé et daté à nous être parvenu dans son intégrité
(Credit British Library)
Cette exposition très approfondie a été assemblée par une équipe de cinq conservateurs dont Emma Harrison, la conservatrice des collections chinoises de la British Library, spécialiste de l’Asie orientale. Elle a décrit pour BBC Culture comment l’écriture « débute avec l’incision, la gravure ou l’impression, sur des matériaux tels le cuivre, la pierre, la cire et l’argile. Puis viennent les encres épanchées à la main sur un support papier, les mécaniques de l’imprimerie et finalement la machine à écrire et l’électronique ».
William Caxton fut le premier à imprimer un livre en anglais
(Credit: British Library Board)
Qu’est-ce que l’avenir réserve à l’écriture ? « Il y a cinq cents ans en Europe, l’utilisation des caractères mobiles ouvrait la voie à des possibilités variées dont s’emparèrent les lecteurs enthousiastes…. ce qui mena à la transformation du sens que de nombreux Européens avaient d’eux-mêmes » écrit le professeur de design Ewan Clayton dans le livre qui accompagne l’exposition, « il est indéniable que nous faisons actuellement l’expérience d’une autre rupture sismique de ce type dans l’ordre de l’écrit. »
La machine à écrire chinoise à deux leviers est dépourvue de clavier : les dactylos choisissent un caractère et appuient sur un levier pour l’enduire d’encre puis taper avant de le remettre à sa place
(Credit: British Library Board)
On n’arrêtera pas la marche de la numérisation quoique l’écriture à la main ne semble pas près de disparaître. A. Harrison se déclare, pour sa part, prête à « utiliser une gamme de techniques : je ne me sens ni technophile ni traditionaliste, je saute de l’un à l’autre. » Or s’il y a un type de calligraphie qui n’a rien perdu de sa puissance – notoirement sa puissance politique – c’est bien le graffiti, dont un exemple a été créé pour l’exposition par le graffeur franco-tunisien eL Seed. Politiquement engagé, il intègre dans son œuvre les notions de beauté et de forme qu’exprime la tradition arabe de l’art graphique à la pratique du graffiti. On y lit la citation voulue [2] par le poète Kahlil Gibran sur sa pierre tombale « Je suis vivant comme toi ». Quand bien même les habitués de la British Library passent le plus clair de leur temps à manier des écrits imprimés ou numérisés, il reste clair que l’antique art de la calligraphie se porte au mieux.
Le graffeur franco-tunisien eL Seed a créé une œuvre inspirée par l’inscription de Kahlil Gibran pour sa pierre tombale « je suis vivant comme vous »
(Tony Antoniou)
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[1] Le titre de l’exposition, Writing : Making Your Mark, porte un calembour : l’expression « to make one’s mark” veut dire “marquer son empreinte ». « laisser sa trace » « faire impression ».
[2] L’inscription, comme l’indique la citation dans son intégralité se trouve au côté de la tombe. Cf. https://fr.qwerty.wiki/wiki/Kahlil_Gibran voir sous « mort ».
Lectures supplémentaires :
Les livres sont mon truc
Le 13 septembre 2013
Les mystérieuses origines du livre
Le 18 octobre 2016
At the British Library, Writing Is a Work of Art
The New Yorker, August 5 & 12, 2019
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