Nous avons demandé à notre contributeur fidèle, René Meertens, traducteur de langue française, et notre « Linguiste du mois de janvier 2019 », de commenter le néologisme virtual walkout (grève virtuelle en francais), qui a paru dans la presse américaine le 1 juin 2020. René a bien voulu rédiger l'article suivant à notre intention.
René a été employé par l'ONU, l'Unesco, la Commission européenne et l'Organisation mondiale de la santé. Il est l'auteur, notamment, du « Guide anglais-français de la traduction », dont une édition numérique et une nouvelle édition papier sont parues récemment.
Les contributions précédentes de René sont accessibles à https://bit.ly/2XlSaWq
Le New York Times a publié hier un article intitulé « Facebook Employees Stage Virtual Walkout to Protest Trump Posts ». Ce titre peut se traduire comme suit : Des salariés de Facebook se mettent en grève virtuelle pour protester contre les publications de Trump.
Si le terme « walkout » est souvent utilisé pour désigner une grève, il semble que l’expression « virtual walkout » soit nouvelle. Ce néologisme nous intéresse donc dans une optique linguistique.
Si cette grève est dite « virtuelle, c’est parce que la plupart des employés de Facebook travaillent à domicile, ce qui donne un caractère original à leur mouvement. Habituellement, les grèves évoquent d’autres images que celles de salariés se croisant les bras dans leur salon.
De quoi s’agit-il ? Donald Trump a publié sur Twitter et Facebook des messages qui peuvent être interprétés comme des appels à des actes de violence.
L’un d’entre eux, publié sur Facebook, s’achève ainsi : « A la moindre difficulté, nous prendrons les choses en main mais quand le pillage commence, les coups de feu commencent. Merci ! »
En fait, le titre du New York Times est un peu trompeur car c’est surtout contre la politique d’inaction du directeur général de Facebook que ces salariés veulent protester. Alors que Twitter s’est démarqué de publications agressives de Trump en invitant les internautes à consulter des sources d’information fiables, Mark Zukerberg refuse de faire quoi que ce soit, en se retranchant derrière la liberté d’expression du président.
Chacun jugera.
Facebook a récemment informé ses salariés que désormais ils travailleront en permanence à domicile. Comme nous l’avons signalé dans un article précédemment publié sur ce blog (voir la citation ci-dessous), le mot « télé-travail » n’est pas nouveau mais il est maintenant d’usage courant en raison de la pandémie de coronavirus. Celle-ci a aussi donné naissance à une expression entièrement nouvelle : virtual walkout.
Post scriptum :
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télé-travail -
en anglais telecommuting, telework, teleworking, working from home (WFH), mobile work, remote work, flexible workplace
Le journal Le Monde, 23.4.2020, fait allusion au « télé-travail ». Ce terme est à la mode suite au confinement, mais il n'est pas nouveau. Selon Wikipedia : « Promu dès les années 1970 (via le téléphone et surtout le fax), dont en France par les
pouvoirs publics français qui y voyaient un mode d'aménagement du territoire
, c'est en 1972 que le terme " telework " apparaît pour la première fois dans un article du Washington Post signé par le journaliste Jack Schiff et, à la même époque, Jack Nilles, considéré comme le père du télétravail lance ses premiers travaux sur ce qu’il baptisa, en 1975, le "telecommuting". »
Article très intéressant et pertinent comme toujours. Quand j'étais jeune (juste après que les dinosaurs ont disparu), je faisais déjà des grèves virtuelles, en protestant avec un bandeau noir au bras, pour signifier mon désaccord, mais en continuant à travailler ou à étudier.
Nous avions beaucoup d'espoirs pour 2020 - année 20/20 comme on le dit en français, mais jusqu'ici, peut mieux faire hélas.
Rédigé par : Jacquie Bridonneau | 02/06/2020 à 23:53