Le 2 juin 2011, nous avons rapporté sur ce blog les résultats de la National Spelling Bee (concours d’orthographe national) des États-Unis par cette annonce : « Sukanya Roy, 14 ans, a remporté le Championnat d’orthographe des États-Unis après avoir épelé correctement le mot anglais « cymotrichous », dérivé du grec, qui veut dire « aux cheveux ondulés ».
Le 30 mai 2014, sur le même thème, nous avons écrit : « À la une : L’édition 2014 du championnat d’orthographe des États-Unis a été remportée par des Américains originaires d’Inde pour la septième année consécutive »
Jeudi, cette domination des Américains d’origine indienne a été rompue par une nommée Zaila Avant-garde, résidente de la Nouvelle-Orléans, 14 ans, la première Afro-Américaine à remporter cette compétition très médiatisée. C'est aussi la première fois depuis 2008 qu'au moins un champion ou co-champion du concours n'est pas d'origine sud-asiatique.
Pour en arriver là, elle a dû épeler « querimonious », « solidungulate », « murraya » et d’autres mots dont beaucoup de gens n’ont jamais entendu parler.
Lors de cet événement à Orlando, en Floride, Zaila a écarté les 11 autres finalistes en lice pour le titre et a remporté le premier prix de 50 000 $.
La jeune fille n’est jamais allée à l’école – elle a toujours été éduquée à domicile.
Son nom de famille, très inusité, a été choisi par son père en hommage au musicien d’avant-garde John Coltrane.
La plupart des compétiteurs dans ce concours d’orthographe (l’anglais spelling bee signifie littéralement « abeille d’orthographe ») semblent être des « rats de bibliothèque » qui se préparent pendant de longues années avec une assiduité extraordinaire. Zaila soutient qu’elle a lu plus de mille livres dans sa courte vie. Fait non moins impressionnant, elle détient déjà trois records du monde comme basketteuse pour avoir dribblé plusieurs ballons à la fois et est apparue dans une publicité avec la mégastar de la NBA Stephen Curry.
Jonathan G. |
avec la preciéuse aide d'Elsa Wack
Note langagière :
Certaines langues, comme l'espagnol, s'écrivent comme elles se prononcent. Ce n'est pas le cas d'autres, telles que l'anglais ou le français. Si l'on présentait à une personne qui connaît très mal l'espagnol un texte rédigé dans cette langue, qu'elle ne comprendrait évidemment pas, et si elle le lisait à haute voix, les sons qu'elle produirait seraient dans l'ensemble compréhensibles pour un locuteur espagnol (si ce n'est que l'accent risquerait d'être mal placé dans le cas d'un grand nombre de mots). Il n'en serait pas de même pour le français notamment parce que dans un grand nombre de mots la dernière lettre ne se prononce pas (toit, aux, quand, janvier, etc.) ou que, dans certains cas, la dernière syllabe est muette (assurent, veille, fesses, etc.). En anglais, l'écart entre la prononciation des mots et leur orthographe est encore beaucoup plus important. [1]
Le dramaturge irlandais George Bernard Shaw aurait dit, par boutade, que le mot "fish" pourrait s'écrire "ghoti" si l'on utilise les lettres "gh" telles qu'elle sont prononcée dans le mot "enough", la lettre "o" telle qu'elle est prononcée dans le mot "women" et les lettres "ti" telles qu'elles sont prononcées dans le mot "action". En fait, ce raisonnement facétieux ne serait pas dû à Shaw et aurait en outre été réfuté. [2]
Le grand nombre d'orthographes irrégulières en anglais et la grande étendue du vocabulaire de cette langue (même si un très grand nombre de mots sont rarement utilisés) est à l'origine d'une tradition américaine : le championnat d'orthographe (spelling bee, en anglais). Le Collins English Dictionary, Complete and Unabridged, définit spelling bee comme suit : a contest in which players are required to spell words according to orthographic conventions (une compétition au cours de laquelle les joueurs doivent épeler des mots conformément aux conventions typographiques). Pour connaître l'origine de cette expression, cliquez ici. Noah Webster (1758-1843) écrivit le premier dictionnaire anglais d'orthographe en 1783.[3]
[1] Voir Contre la pensée unique, Claude Hagège, Édition Odile Jacob, p.142.
[2] Dans la Language Column du New York Times datée du 27 juin 2010, le linguiste Ben Zimmer examine cette question et conclut comme suit : "La plupart des gens qui verraient le mot ghoti le prononceraient simplement goaty… On ne peut pas tout se permettre en anglais".
[3] Son titre initial était The First Part of the Grammatical Institute of the English Language. De son vivant, pas moins de 385 éditions furent publiées et le titre de l'ouvrage devint, en 1786, The American Spelling Book et, en 1829, The Elementary Spelling Book. Il s'agissait du livre américain qui eut le plus de succès à son époque ; en 1837, 15 millions d'exemplaires avaient été vendus et le chiffre atteint environ 60 million en 1890, de sorte que la majorité des élèves et des étudiants consultèrent ce livre pendant le premier siècle d'existence de la nation américaine. Pour mieux connaître le rôle de Webster dans l'évolution de l'anglais aux États-Unis, vous pouvez vous reporter à l'article de Wikipedia consacré à Noah Webster.
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