Le poème américain iconique d'Emma Lazarus
Un aperçu historique, social et littéraire
La poétesse américaine Emma Lazarus (1849–1887) est surtout connue pour son poème The New Colossus, écrit en 1883. Il s’agissait alors de réunir des fonds pour construire un socle pour la Statue de la Liberté (La Liberté éclairant le monde). La statue, œuvre du sculpteur français Auguste Bartholdi, et sa structure métallique construite par Gustave Eiffel, étaient un cadeau de la France aux États-Unis. Le sonnet de Lazarus fut commémoré en 1903 par une plaque de bronze apposée à l’intérieur du socle de la statue. Cette plaque est maintenant exposée au Musée de la Statue de la Liberté.
Une analyse de ce poème (intitulée « A POEM GUIDE »), par Allen Austin, a paru dans le magazine en ligne de la Poetry Foundation. Avec l’aimable autorisation de cette fondation, nous avons demandé à notre fidèle rédactrice et traductrice Elsa Wack de traduire cet article. C’est donc sa traduction que vous trouverez ci-dessous. Ce poème a également été traduit dans une version en prose de Laure-Anne Bosselaar-Brown, que vous pouvez écouter ici:
The New Colossus
Not like the brazen giant of Greek fame, With conquering limbs astride from land to land;
Here at our sea-washed, sunset gates shall stand
A mighty woman with a torch, whose flame
Is the imprisoned lightning, and her name
Mother of Exiles. From her beacon-hand
Glows world-wide welcome; her mild eyes command
The air-bridged harbor that twin cities frame.
“Keep, ancient lands, your storied pomp!” cries she
With silent lips. “Give me your tired, your poor,
Your huddled masses yearning to breathe free,
The wretched refuse of your teeming shore.
Send these, the homeless, tempest-tost to me,
I lift my lamp beside the golden door!”
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La Nouvelle Grandeur Pas comme le colosse qui, du vieux continent, |
Texte original : Emma Lazarus | Traduction : Elsa Wack |
POEM GUIDE
Le poème d’Emma Lazarus « The New Colossus »
Un sonnet se dresse là où les eaux indomptées de la littérature rencontrent les territoires du droit.
PAR AUSTIN ALLEN
S’il est un poème qui est devenu institution, c’est bien « The New Colossus » (La nouvelle grandeur). Depuis 1903, l’année où il fut gravé sur une plaque et apposé à l’intérieur du socle de la Statue de la Liberté, ce sonnet emblématique d’Emma Lazarus est devenu l’un des poèmes les plus célèbres et les plus cités de la planète. Et pourtant, il était le fait d’une auteure restée obscure de son vivant et qui avait presque sombré dans l’oubli avant qu’il ne soit placé dans cet écrin. Aujourd’hui, le sonnet semble indissolublement lié au monument ; ils se sont redéfinis l’un l’autre. Sans avoir force de loi, mais ancré à jamais dans la culture citoyenne américaine, The New Colossus s’est forgé un genre littéraire bien à part : c’est un credo, et un geste de « bienvenue mondiale » qui attire la controverse comme un aimant.
Comme l’ont noté beaucoup de commentateurs, c’est un poème aux racines pluralistes : un sonnet italien composé par une juive américaine, qui oppose une statue de la Grèce antique avec une statue construite dans la France des temps modernes. Quand il fut écrit en 1883, les immigrants européens – italiens, grecs et juifs russes, entre autres – arrivaient en masse en Amérique, soulevant d’âpres débats et souvent de l’hostilité chez les « natifs » (comme s’intitulaient, parce qu’ils étaient nés sur sol américain, les descendants d’immigrants européens plus anciens).
National Park Service, Statue of Liberty NM |
Dans ce climat tendu, Emma Lazarus, écrivain et militante d'une famille new-yorkaise aisée, s’était engagée bénévolement dans l’aide aux exilés en détresse de la Russie tsariste. À peu près à la même époque, le roman Daniel Deronda, de George Eliot (1876), qui traite de sujets proto-sionistes, avait accru son intérêt pour son propre patrimoine juif. Quand on lui demanda un poème pour appuyer une collecte de fonds en faveur d’une statue en cours d’édification, que le sculpteur français Auguste Bartholdi avait conçue en vue de la faire installer dans le port de New York, Lazarus adopta une approche de poétique publique qui allait s’avérer fertile, en investissant calmement son sujet de son vécu et de ses préoccupations personnelles.
Conçue au départ par le sculpteur, Lady Liberty représentait, simplement, la liberté [1]. Le titre complet de la statue de Bartholdi est La Liberté éclairant le monde. Son sujet est la déesse romaine Libertas, déjà évoquée dans tableau d’Eugène Delacroix La Liberté guidant le peuple (1830), dans lequel elle porte un drapeau (rouge) et un fusil. Pour honorer la représentation plus pacifique de Bartholdi, Lazarus soulignait un autre aspect de la liberté : le courage de combattre l’ennemi était remplacé par la volonté d’accepter l’étranger. Les premières audiences du poème perçurent la puissance de cette réinterprétation. Pour réunir des fonds au moyen d’une exposition, l’on avait sollicité des œuvres d’art et des textes littéraires à vendre aux enchères. D’après Bette Roth Young, biographe de Lazarus, The New Colossus fut « la seule rubrique dont il fut donné lecture » lors du gala d’inauguration de cette exposition. Plus tard la même année, le poète James Russell Lowell écrivit à Lazarus : « Votre sonnet donne à son sujet sa raison d’être. »
Il a également apporté à son auteure une renommée durable. Young note que Lazarus l’avait placé au tout début du manuscrit qu’elle assembla avant de mourir, comme si elle savait que ce sonnet pourrait faire sa réputation. Ce fut le cas, mais en même temps, il la cataloguait peut-être un peu trop. Sa biographe Esther Schor déplore que « pendant plus d’un siècle, [le destin] s’est acharné à réduire l’œuvre qu’elle avait laissée à un unique sonnet. » Adéquate ou non, c’est une consécration que peu de poètes dédaigneraient, car le poème a fait un bond formidable au-delà les anthologies pour s’inscrire dans les annales de l’histoire.
Pourtant, après des débuts prometteurs, le poème fut presque oublié. Quand elle mourut en 1887, Lazarus n’avait pratiquement plus de lecteurs. Selon le National Park Service, une institution américaine de protection du patrimoine,
Ce n’est qu’en 1901 ... que Georgina Schuyler, une de ses amies, trouva dans une librairie un livre contenant le sonnet et organisa un mouvement citoyen pour redonner vie à l’œuvre perdue. Ses efforts ont porté leurs fruits... |
Ils furent même payants au-delà de ce qu’elle pouvait attendre. La plaque pour laquelle elle avait fait campagne vit le jour deux ans plus tard, intégrant le poème dans la conception que l’Amérique avait d’elle-même et, dans une certaine mesure, que le monde avait de l’Amérique. Des millions de T-shirts et d’objets-souvenirs attestent de la puissance de la Liberté en tant que publicité pour le rêve américain. Lu d’un œil cynique, The New Colossus est une sorte de « pitch » (condensé destiné à capter l’attention – après tout, il provenait d’une collecte de fonds), et les mots « Donne-moi tes éprouvés, tes pauvres » sont un slogan émouvant mais illusoire. Lu d’un œil généreux, le poème était une reconception audacieuse non seulement de la statue, mais du rôle de l’Amérique sur la scène mondiale. S’il est dépourvu de l’ironie et du combat intérieur que l’on attend aujourd’hui de la littérature moderne, c’est parce qu’il était un acte politique conscient et fondateur d’un mythe. Quoi qu’il en soit, sa vision va bien au-delà des mots. Comme on a pu le lire dans le New York Times en août 2017, les visiteurs étrangers associent souvent la statue à la bienvenue avant d’avoir vu le poème qui a forgé cette association ou même d’en avoir entendu parler.
Bien qu’il se veuille inclusif à l’extrême, ce message de bienvenue a toujours été désavoué par une partie de la population américaine. L’historien Paul A. Kramer, qui retrace la xénophobie américaine pour le magazine Slate, observe qu’entre les années 1920 et 1960, « les tenants d’une restriction de l’immigration ont remodelé la Statue de la Liberté en une sorte de déesse guerrière, militante et gardienne des portes d’une Amérique assaillie de toutes parts ». En 2017, la politique d’un président qui voulait fermer la porte aux réfugiés musulmans, aux immigrants mexicains sans-papiers et à d’autres a nourri de nouvelles controverses sur la symbolique de la statue. Un haut responsable à qui un journaliste demandait, lors d’une conférence de presse, comment la Maison Blanche s’accommodait des vers de Lazarus, s’est fait l’écho du point de vue « nativiste » en objectant que le poème « ne faisait pas partie de la statue à l’origine » et qu’il ne fallait pas confondre sa signification avec celle du monument. Les médias et les critiques littéraires publièrent bientôt des répliques et des analyses ainsi que des poèmes en hommage au New Colossus, pourfendant la bigoterie des nativistes. Cent trente ans après sa mort, Emma Lazarus était brûlante d’actualité.
Pourtant, la controverse ne vient pas que du noyau dur des nativistes. Elle est inhérente à la vie américaine et même, dans certaines interprétations, au New Colossus lui-même. Quand Lazarus décrit les immigrants comme un wretched refuse (« misérable rebut »), son intention n’est sûrement pas d’être condescendante (dans « misérable », on entend de la pitié plutôt qu’un jugement moral ; « rebut » signifie manifestement « exclus » plutôt qu’« ordures »), mais ces mots ont fait froncer les sourcils à plus d’un. Le professeur de journalisme Roberto Suro a écrit : « Cela s’applique à certains réfugiés, certes, mais pas à la plupart des immigrants. » Jerry Seinfeld s’en est régulièrement moqué dans ses sketches stand-ups : « Je suis pour une immigration ouverte, mais cette plaque que nous avons sur la Statue de la Liberté …. Faut-il vraiment spécifier « le misérable rebut » ? … Pourquoi ne pas dire « Donnez-nous les malheureux, les tristes, les lents, les laids, ceux qui n’ont pas le permis de conduire… ? »
Derrière l’humour décalé, il y a de vraies tensions et de vraies questions. Le plaidoyer humaniste du poème aurait-il des relents de snobisme ? Dépeint-il le vécu des immigrants de manière trop caricaturale ? La plupart des New-Yorkais et des Américains partagent-ils les idéaux élevés de Lazarus ? Kramer estime que le poème « portait en lui cette vision ambivalente de l’immigrant … mais l’idée que les États-Unis étaient un havre de paix pour les rejetés de tous bords s’y exprimait aussi avec une hardiesse nouvelle, qui allait être en butte à des attaques répétées dans les décennies qui suivraient. » Les attaques n’ont jamais cessé et le mélange de hardiesse et d’ambivalence du poème reste un défi dans tous les sens du terme.
* * *
Chaque année, des millions de touristes jettent un coup d’œil au poème The New Colossus, mais peu de critiques analysent le texte de près. Le commentateur Max Cavitch déplore qu’il soit trop souvent lu en diagonale. Nous savons qu’il est une sorte d’estampille, mais que nous dit-il en tant que poème ?
Lazarus commence son sonnet par une figure inhabituelle qu’on pourrait appeler une comparaison inverse : « Pas comme ». Non, son sujet n’est pas comme le colosse grec, impérieux et viril, qui surplombait le port de l’île de Rhodes au 3e siècle avant J.-C. (la légende voudrait qu’il ait enjambé le port, une impossibilité technique). C’est par cette négation de son célèbre prédécesseur que la poétesse définit Lady Liberty :
Not like the brazen giant of Greek fame,
With conquering limbs astride from land to land ;
Here at our sea-washed, sunset gates shall stand
A mighty woman with a torch, whose flame
Is the imprisoned lightning, and her name
Mother of Exiles.
Pas comme le colosse qui, du vieux continent,
Franchissait, conquérant, détroits et défilés,
Ici, les pieds baignant dans les flots d’Occident,
Une femme se dresse, mère des exilés.
Dans son flambeau, la foudre, capturée, luit.
Son bras est comme un phare…
Le mot brazen [2] fait à la fois référence au métal dont était revêtu le Colosse de Rhodes et à l’arrogance que tendent à manifester les conquérants. Lady Liberty, bien que puissante, elle aussi, est accueillante et protectrice. Sa force et sa fierté sont toutes maternelles, bien qu’elle ait dans sa torche électrique le pouvoir « d’emprisonner la foudre », comme Zeus, dieu patriarcal. Les vers suivants soulignent cette dualité :
From her beacon-hand
Glows world-wide welcome; her mild eyes command
The air-bridged harbor that twin cities frame.
…vers la mer tendu ;
Du port qu’elle domine, où un pont suspendu
Relie deux cités, elle accueille et conduit.
Elle est un « phare » d’hospitalité ; elle se tourne avec douceur vers le monde et ses exilés – et en même temps, elle commande (ce mot a beaucoup de poids à la fin du vers anglais). Les « cités jumelles » qu’elle domine sont New York et Brooklyn, qui n’allaient fusionner officiellement qu’en 1898. Son domaine, c’est l’entrée de la métropole qu’était déjà New York en 1883, mais son rôle est d’accueillir, pas de surveiller.
Selon les conventions de la forme du sonnet, la rhétorique fait un « virage » au neuvième vers. Le sizain final proclame le message de la Liberté à l’Ancien Monde :
"Keep, ancient lands, your storied pomp!" cries she
With silent lips. "Give me your tired, your poor,
Your huddled masses yearning to breathe free,
The wretched refuse of your teeming shore.
Send these, the homeless, tempest-tost to me,
I lift my lamp beside the golden door!"
Elle crie en silence : « Vos fastes d’un autre âge,
Gardez-les, vieux pays ! Mais vos déshérités,
Vos masses entassées, rêvant de liberté,
Rebut las de vos surpeuplés rivages,
Sans-abri, chavirés, je leur ouvre le port,
Je leur ouvre la porte, la porte d’or ! »
C’est le passage que même les enfants des écoles et les politiciens connaissent plus ou moins. Nous avons en mémoire la compassion débordante, mais tendons à oublier qu’elle est précédée d’un note de provocation bien new-yorkaise. Vos réfugiés sont les bienvenus ici, dit Liberty à l’Ancien Monde, mais pas vos élites compassées.
Le vers des ancient lands est une pique démocratique contre les monarchies européennes. Hélas, l’Amérique n’est pas une si glorieuse exception, et c’est peut-être l’aspect du poème qui a le plus mal vieilli. À notre époque de partisanisme exacerbé, de graves inégalités, alors qu’un nombre atterrant d’Américains désavouent la politique de leur Congrès, ils sont de de plus en plus nombreux à se sentir heurtés par la pompe de leurs propres dirigeants ; certains cherchent en Europe des modèles d’une démocratie qui puisse fonctionner. En même temps, la main que la Liberté voudrait tendre aux « sans-abri » est un douloureux rappel de tous les « exténués » et les « pauvres » auxquels le pays ne réussit pas à procurer un abri, qu’ils soient nés aux États-Unis ou ailleurs. De plus, de nombreux Américains sont des descendants de captifs – ou avaient eux-mêmes été des captifs, du temps de Lazarus – envoyés par bateau en esclavage d’un côté à l’autre de l’Atlantique, sans égard à leur « rêve de liberté » (littéralement : à leur besoin de « respirer librement »). Liberty passe outre cette partie de l’histoire.
L’essai de Kramer, après avoir signalé plusieurs trahisons des idéaux de la statue dans l’histoire américaine, en conclut qu’« aux États-Unis, la vision d’une nation généreuse ... a déjà surmonté de terribles forces d’exclusion par le passé et le pourra peut-être encore ». Lazarus partagerait sans doute cet espoir. Pourtant, la « porte d’or » reste ce qu’elle était à la Belle Époque : une aspiration plutôt qu’une réalité.
* * *
Le New Colossus est plus souvent analysé en sociologie qu’en littérature. Mais la poésie classique ne naît et ne se nourrit jamais d’un vide littéraire. Par-delà les bords de la plaque, le poème de Lazarus s’inscrit dans un riche dialogue avec des textes plus anciens ou plus récents.
Max Cavitch, par exemple, trouve un modèle de la « lampe » de la Liberté dans Daniel Deronda, où le personnage proto-sioniste de Mordecai proclame : « Ce qui est nécessaire, c’est le levain, c’est la semence de feu. L'héritage d'Israël est vivant dans les battements de millions de cœurs... Que la torche de la communauté s’allume! » Il est fort probable que ce passage ait fait vibrer une corde sensible chez Lazarus. Ce roman l’avait profondément émue et, comme le relève Schor, elle a été « parmi les premières notables d’Amérique à prendre publiquement fait et cause pour un État juif ». Toutefois, si Lazarus a emprunté ce symbole à Eliot, elle l’a aussi américanisé et universalisé, faisant de la « torche » un phare pour toutes les communautés.
Et en poésie, quelles ont été les influences ? The New Colossus tient peut-être aussi de Walt Whitman, qui exprimait un sens extatique de la collectivité dans Crossing Brooklyn Ferry. Ce poème aussi avait pour cadre les eaux qui environnent New York.
Une référence encore plus probable est l’autre grand sonnet du 19e siècle dédié à une statue : Ozymandias, de Percy Bysshe Shelley (1818).
Dans sa description du monument écroulé d’un tyran arrogant (Look on my works, ye mighty, and despair! [Voyez mon œuvre, vous les puissants, et perdez vos espoirs !]), Shelley ironise sur la démesure du pouvoir éphémère. C’est un conte d’avertissement sur la chute des civilisations. Bien que l’allusion ne soit jamais explicite, on est tenté d’opposer au « ricanement de froid commandement » (sneer of cold command) d’Ozymandias la maîtrise (command) du regard posé de Liberty ; sa compassion démocratique contraste aussi avec la cruauté autocrate, et son message d’espoir, avec l’appel à désespérer ; et sa solidité triomphante aux ruines d’Ozymandias.
The New Colossus a également des échos dans la poésie moderne, et pas seulement dans la poésie politique dont il a été un fondement explicite. Par exemple, The Colossus, de Sylvia Plath, construit également un mythe moderne par allusion au Colosse de Rhodes. Les débris de sa statue patriarcale sur un rivage déserté contrastent violemment – peut-être délibérément – avec la « Mère des exilés » accueillant des navires. The Bridge de Hart Crane (1930), vision tantôt extatique, tantôt désespérée de l’Amérique, semble également avoir reçu la visite du fantôme de Lazarus. Dans un passage du livre de Crane, un marin ivre rentre chez lui en titubant « tandis que l’aube faisait ressortir la statue de la Liberté » : morne moment où l’ironie s’adosse à l’optimisme de Lazarus.
Il ne fait pas de doute que la portée du New Colossus a été bien plus vaste que la page d’écriture. À la différence de la plupart des poèmes, celui-ci existe à la limite entre les eaux libres de la littérature et les territoires du droit strict. Au grand large, le langage explore ce qui n’est pas littéralement en cause ; plus près des terres, il affirme ce qui pourrait ou devrait être en cause ; lorsqu’il passe sur la terre ferme, il déclare la cause entendue. The New Colossus, à peine au large du rivage, ne pourra jamais devenir du droit, ne pourra jamais exiger que les États-Unis ouvrent les bras aux étrangers. Il peut juste instiller dans les consciences le sentiment obsédant qu’ils le devraient. Dans son deuxième siècle d’âge, le chef-d’œuvre de Lazarus domine encore l’imaginaire américain, proposant une promesse possible à tenir, mais qui reste non tenue ; impossible à garantir – et impossible à abroger.
Publié pour la première fois en anglais le 22 novembre 2017
Notes de traductrice :
[1] Liberty. L’anglais connaît un autre mot pour notre “liberté”: freedom. Liberty est peut-être un peu plus insolent et est aussi étroitement associé à l’indépendance des États-Unis.
[2] littéralement « effronté », ou « cuivré » pour un timbre musical
[3] En français, on pourrait aussi traduire ce command par « son regard embrasse… »
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