E n t r e t i e n e x c l u s i f
L'intervieweur
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L'interviewée
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Né en Angleterre mais résidant en France depuis 40 ans, Anthony Bulger, est auteur, journaliste et enseignant. Il a aussi travaillé comme directeur pédagogique en Californie. Anthony a été notre linguiste du mois de septembre 2020.
Isabelle Rosselin est traductrice du néerlandais et de l’anglais vers le français depuis une trentaine d’années pour l’édition, la presse, l’audiovisuel et des organisations internationales.Diplômée de l’École supérieure des interprètes et des traducteurs à Paris et titulaire d’un DESS de terminologie à l’université de Paris III, elle est réviseuse au service des langues à la Banque européenne pour la reconstruction et le développement à Londres. Auparavant, elle dirigeait sa propre société de traduction, après avoir été responsable de la traduction à l’hebdomadaire Courrier international et lexicographe au service des dictionnaires bilingues chez Larousse. Elle anime des ateliers de traduction littéraire, notamment au Nouveau centre néerlandais à Paris. Elle a été lauréate, entre autres, du Prix des Phares du Nord en 2016 pour la traduction du roman Villa avec piscine, de l’auteur néerlandais Herman Koch (éditions Belfond), couronnée par le prix de l’Euregio pour ce même livre, et lauréate du Mot d’or 2013 pour la traduction de Congo, une histoire, de David Van Reybrouck.
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Pouvez-vous vous décrire en quelques lignes ?
Passionnée par mon travail, je suis une personne avide de connaissances. . Je suis une éponge, mais qui a du caractère.
Vous avez un profil de carrière atypique – traductrice technique et littéraire mais aussi passionnée de pédagogie et de formation. Comment vous définiriez-vous ?
J’aime relever les défis et je garde un bon sens de l’humour. Les défis, ce sont tous les textes que je traduis. L’humour, c’est ce qui me permet d’avoir du recul sur ce que je fais, de prendre la mesure de la difficulté de la tâche sans me décourager. Pour moi, tous les textes sont une gageure, qu’ils soient techniques ou littéraires. Tout simplement parce qu’on n’a ni l’expérience, ni le vécu, ou encore la vision de la personne qui écrit. Face à un texte, on sait si on se sent prêt à affronter la tâche ou non, donc quand on accepte de traduire un texte, il faut avoir l’honnêteté de dire : non, celui-là, ce n’est pas pour moi, je ne ferai pas du bon travail.
Pour la révision de traductions comme pour la formation, je suis consciente que l’on a tous ses points forts et ses défauts. Cela vaut naturellement pour moi aussi. Certains défauts peuvent se corriger facilement, il suffit de les repérer et de les signaler, tout en encourageant chacun à donner le meilleur de soi, en toute confiance. Une critique constructive et encourageante, voilà ce que j’essaie d’apporter. J’ai enseigné la traduction économique et financière à l’Université de Paris-Diderot (Paris 7), dans le cadre du master de traduction, j’ai encadré de jeunes traducteurs dans le cadre de mentorat de l’Université d’Utrecht et d’ateliers à la Maison des traducteurs à Amsterdam aux Pays-Bas, en leur permettant de publier leur première traduction littéraire, j’ai permis à de jeunes salariés dans l’entreprise de traduction que j’avais créée, Zaplangues, et à la BERD, de se perfectionner, tous ont obtenu des emplois passionnants et je suis heureuse d’avoir pu leur apporter quelques ficelles du métier. Mais aussi de leur avoir donné davantage confiance en eux et de leur avoir dit qu’ils n’avaient rien à perdre à se tromper. Parce que se tromper, si on a un retour et qu’on accueille avec intérêt les critiques bienveillantes, c’est aussi progresser.
Je me souviens que mes professeurs à la fac nous disaient que nous devions choisir entre le technique et le littéraire car les compétences requises étaient très différentes. Mais vous êtes la preuve du contraire. Êtes-vous une exception à la règle ?
Jouer sur les deux tableaux, littéraire ou technique, n’est en effet pas courant. Mais l’approche est à mon avis la même et les compétences requises ne dépendent pas de la qualité littéraire ou technique d’un texte, elles dépendent du texte même. Selon cette distinction arbitraire, littéraire ou technique, à quelle catégorie appartiendrait un discours prononcé par une personnalité comme Martin Luther King devant le Lincoln Memorial, par exemple ? Doit-on le considérer comme technique ou littéraire ? On a là un homme politique, son texte a un objectif « appliqué », concret. Il ne s’agit pas de littérature, et pourtant… Tout est dans la nuance.
Certains textes jugés techniques sont très élégamment rédigés, certains romans sont d’une platitude lamentable. Un texte, qu’il soit technique ou littéraire, peut nécessiter beaucoup de recherches, de temps, d’expérience et de talent.
Je pense qu’il faut choisir ce que l’on fait – quand on a la chance de le pouvoir – selon ses intérêts, ses affinités et son ambition.
Quelles sont les qualités les plus importantes pour un traducteur ?
L’écoute, pour comprendre, le doute pour tenir compte d’une inadéquation entre ses compétences, ses connaissances, et celles de la personne qui a écrit le texte, le courage et l’honnêteté pour s’efforcer d’exprimer la pensée d’autrui en respectant le sens, le style, la portée. Et la patience, pour traduire dans le silence, page après page, la pensée d’autrui, puis confronter le résultat de son travail à des relecteurs qui ne sont pas toujours conscients de tout le travail effectué en amont.
Vous mettez l’accent sur l’importance de la formation. D’après ma propre expérience dans une grande agence de traduction, cette notion d’éducation passe trop souvent à la trappe, faute de temps, d’argent ou, pire, de motivation. Comment analysez-vous le problème ?
Il n’y a pas de traducteurs prêts à l’emploi. Les traducteurs doivent connaître l’organisme ou le client pour lequel ils travaillent : cela prend, à mon avis, au moins trois ans pour un sous-traitant, même chevronné. Le retour sur la traduction qu’on remet est indispensable. J’ai travaillé en tant que traductrice indépendante, en tant que responsable du service de traduction au sein de l’hebdomadaire Courrier international, en tant que responsable de ma propre entreprise de traduction, Zaplangues, maintenant en tant que responsable de la section française du service de traduction de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, et en tant que traductrice littéraire. Dans chacun de ces emplois, j’ai eu des retours sur mon travail. Certaines remarques étaient justifiées – allègement du style, précision terminologique, apport d’une nuance, détection d’un contresens, erreur de référence – , d’autres complètement arbitraires. Employer une expression plutôt qu’une autre qui lui ressemble, choisir un style recherché quand le texte ne s’y prête pas, ajouter inutilement des informations, corriger sans se renseigner au préalable pour savoir si le choix de certains termes est voulu ou non, éliminer systématiquement toutes les répétitions en se contorsionnant pour trouver des équivalences, choisir des expressions alambiquées ou inusitées pour se plier au dogme du politiquement correct – tout cela se fait aussi et c’est à mon sens une perte de temps. J’essaie, quand je forme des traducteurs, de mettre l’accent sur la simplicité, la fidélité au texte, la lisibilité.
Dans les ateliers de traduction littéraire que je donne au Nouveau centre néerlandais à Paris, nous formons un groupe toujours changeant de traducteurs professionnels ou non et nous nous penchons sur des extraits d’œuvres littéraires. Chacun a préparé sa traduction par avance. Les phrases des différents traducteurs apparaissent anonymement, les unes en dessous des autres, dans un livret distribué aux intervenants au début de cet atelier de deux jours. Nous nous efforçons alors, en piochant ici et là dans les solutions proposées, de façonner le texte qui nous semble le mieux refléter l’esprit de l’original. Le résultat auquel nous parvenons est toujours meilleur que celui auquel j’aurais pu parvenir seule. La formation n’est pas à sens unique. Le formateur apprend aussi énormément.
Quand on forme, pourquoi ne pas réagir aux traductions que l’on reçoit en envoyant rapidement un corrigé aux personnes qu’on relit ? Il y a bien sûr des contraintes économiques et de délais. Pour qu’une agence rapporte, il faut produire un texte vite : traduction, relecture, adaptation si nécessaire, et prise en compte des remarques du client, tout cela doit se faire rapidement si l’on privilégie avant tout la rentabilité. Mais des organisations internationales sont aussi confrontées à des exigences économiques et, lorsque le volume de traduction s’accroit considérablement, un retour systématique sur les traductions rendues devient impossible. Ce qui, bien entendu, est vraiment dommage.
Quant à la motivation, c’est certainement un aspect qui joue dans la formation. Quand on fait des remarques et qu’en face, la réaction et la progression sont lentes, cela peut être décourageant. Pourtant, j’ai connu des personnes qui mettaient du temps à avoir un déclic. Le problème venait essentiellement d’un manque de confiance en soi. Une fois ce blocage déverrouillé, elles faisaient des progrès spectaculaires. J’ai eu le plaisir de constater au fil des ans que tous les traducteurs que j’ai formés ou qui se sont perfectionnés sous ma supervision ont obtenu par la suite de très bons postes dans des institutions européennes ou internationales, ou ont créé avec succès leur propre activité en tant qu’indépendant ou entreprise.
Revenons à la traduction. Permettez-moi de faire l’avocat du diable : à quoi bon dépenser autant de temps et d’argent à la formation alors que les outils de traduction automatisée sont de plus en plus perfectionnés et que nous nous approchons de la Singularité technologique prônée par Ray Kurzweil?
On peut se former sur le tas, en traduction. Il y a des traducteurs de génie qui n’ont pas suivi de formation. Mais dans le monde d’aujourd’hui, mieux vaut avoir un diplôme. En quoi doit consister une formation de traducteurs, que ce soit pour apprendre le métier ou pour se perfectionner ? Bien malin qui saurait donner une réponse simple. À la base, il faut avoir une prédisposition et des intérêts, comme je l’ai déjà précisé plus haut. Mais une personne qui aime les langues, qui parle plusieurs langues, ne sait pas forcément traduire.
La formation coûte cher et prend du temps ? Oui. Mais que dire du recrutement des traducteurs prétendument parfaits ? Quel est le coût en ressources humaines pour définir et lancer une annonce, puis présélectionner les candidats ? Quel est le temps passé en correction de tests ?
Les outils de traduction automatisée sont un trésor, s’ils tombent entre de bonnes mains. Je suis pour l’élimination de taches récurrentes, de référencements fastidieux, d’harmonisations chronophages en utilisant des outils de traduction assistés par ordinateur. Et je suis pour l’utilisation de logiciels d’intelligence artificielle qui brassent des corpus gigantesques et peuvent être adaptés à une organisation pour éviter des recherches à n’en plus finir de textes antérieurs comparables pour une mise à jour rapide de documents et même l’obtention d’une première traduction dans un délai ultracourt d’un texte extrêmement long. Et maintenant les machines apprennent. Pour l’instant, de gros problèmes persistent cependant. On forme désormais des traducteurs pour corriger le travail de machines, qui font des erreurs moins prévisibles que les humains. Et les nuances, et le sous-jacent ? Et l’intérêt du travail pour un traducteur qui ne génère plus du texte mais améliore le produit de la machine ? Et les tarifs accordés au rabais aux traducteurs sous prétexte qu’une partie ou la totalité du travail peut être effectué par une machine ?
Tous les traducteurs s’entendent pour dire qu’il y a des textes qui se prêtent bien à la traduction automatisée et d’autres pas. L’évolution des outils informatiques, et la vision du futur de Ray Kurzweil, touchent tous les domaines. À quand les discours politiques générés par des machines ? De toute évidence, il faut tirer parti de ce que la technologie peut nous apporter en tentant d’éviter de jouer à l’apprenti sorcier.
Vous avez travaillé à la fois comme traductrice indépendante, mais aussi au sein de votre propre entreprise et dans une équipe de traducteurs pour un organisme international. Avez-vous une préférence ? Et si oui, pourquoi ?
Un aspect fascinant de mon travail est d’être en prise avec les événements lors de la traduction de documents, de correspondances et de rapports en cas de crise, en particulier récemment avec la guerre contre l’Ukraine. Je travaille en équipe, avec d’autres traducteurs mobilisés autour des événements, et la forte réactivité nécessaire et les échanges entre traducteurs sont très fructueux. À la BERD, il y a quatre langues officielles, l’allemand, l’anglais, le russe et le français. L’interprétation de certaines ambigüités selon les langues est très intéressante.
En tant que traductrice littéraire, il m’arrive de traduire en tandem. Je l’ai fait entre autres pour la traduction des Journaux d’Anne Frank, avec un excellent traducteur, Philippe Noble. Pour que la collaboration marche, il faut une bonne complémentarité, une bonne entente et de bons échanges.
Je trouve passionnant et instructif d’observer de près le travail d’une personne exerçant le même métier que moi. La finesse d’analyse du texte, la facilité d’expression, la créativité. J’aime la dynamique qu’engendre le travail à plusieurs.
En tant que traductrice indépendante, j’ai toujours tissé des liens avec les personnes à la source des textes, en essayant de mieux comprendre les besoins du client. Je n’ai jamais travaillé isolée. Seule oui, mais pas isolée.
Je n’ai donc pas de préférence, entre un environnement de travail ou un autre. Tout dépend du projet et des personnes qui interviennent. Tout dépend aussi de la facilité à obtenir les informations recherchées.
Dans votre travail au sein de la BERD, vous avez besoin de connaissances techniques approfondies, certes, mais aussi d’autres compétences qu’on pourrait qualifier de « compétences douces ». Expliquez-nous !
La traduction nécessite certes des connaissances approfondies, le don des langues, la capacité d’exprimer la pensée d’autrui, donc disons des compétences techniques, mais cela ne suffit pas. Les traducteurs sont des intermédiaires. Ils font le lien entre les donneurs d’ouvrage, qui ne sont pas toujours les auteurs, et les récepteurs du travail, qui ne sont pas toujours les lecteurs finaux. Les traducteurs font donc partie d’une longue chaîne et n’ont pas toujours accès aux auteurs initiaux, comme des ministres par exemple, ou aux lecteurs finaux, comme des participants à une conférence à l’autre bout du monde. Il faut donc qu’ils aient conscience de l’origine et de la finalité du texte à traduire, des informations dont ils ne disposent pas toujours malheureusement, et qu’ils puissent se procurer l’information en amont et assurer la bonne réception en aval, ce qui est parfois délicat. La demande de renseignements lorsqu’on traduit un texte peut être perçue comme un manque de compétence, même au sein de l’organisme où l’on travaille ou pour des auteurs que l’on connaît bien. Et si les auteurs sont de langue maternelle française et ont écrit leur texte en anglais, ils peuvent trouver que le texte traduit n’est pas à l’image de ce qu’ils auraient pu écrire dans leur propre langue. De même, le récepteur du travail peut être confronté à une terminologie interne à un organisme qui ne lui convient pas et souhaiter réécrire le texte de façon à produire un autre effet sur les lecteurs. Les modifications souhaitées ou introduites ne sont pas toutes bonnes à prendre. Il faut alors savoir faire preuve d’une grande diplomatie pour conserver certaines formulations.
En ce qui concerne la traduction littéraire : quelles compétences spécifiques sont nécessaires pour réussir dans cette spécialité ?
J’ai répondu plus haut qu’il n’y a pas de compétence spécifique et que tout dépend du texte. J’ajouterai ici cependant qu’en traduction littéraire, il est peut-être moins évident de repérer les références qui sont faites à l’intérieur d’un ouvrage. Dans un livre que j’ai traduit, un notaire faisait visiter une maison. En discutant avec l’auteur, j’ai compris que cette visite, où l’on allait de la cave au grenier, faisait écho à la Divine Comédie de Dante. Il y est fait référence dans le livre, mais si la remarque de l’auteur ne m’avait pas incitée à lire ce poème, je ne me serais pas rendu compte aussi clairement des allusions contenues dans le livre.
Quel est le livre que vous a donné le plus de plaisir à traduire ? Et le plus de difficulté ?
Pour la traduction, je n’emploierai pas le mot plaisir. Le métier est tout de même ardu, même si on l’aime. Je préfère parler plutôt des livres qui m’ont touchée, enthousiasmée. Traduire ces livres a été pour moi un honneur. Je me suis sentie portée par l’énergie, l’intelligence, le talent de l’auteur. Le plus difficile, pour chacun de ces ouvrages, a été de trouver le ton juste.
Guerre et térébenthine (Gallimard, 2015) et Le cœur converti (Gallimard, 2016), de Stefan Hertmans, le premier pour la restitution touchante d’un journal écrit pendant la Première Guerre mondiale par le grand-père de l’auteur puis le récit de la vie de cet homme, et le deuxième pour une incroyable histoire d’amour entre une fille de viking et le fils d’un rabbin au 11e siècle, un roman basé sur des faits réels.
Le journal d’Anne Frank, pour ce témoignage saisissant, émouvant, de cette enfant vive, drôle, éliminée par le régime nazi. Et pour la formidable coopération avec mon co-traducteur Philippe Noble.
Congo (Actes Sud, 2010), Contre les élections (Actes Sud, 2014) et Revolusi (Actes Sud, 2022) de David van Reybrouck, celui-ci co-traduit avec Philippe Noble, pour les témoignages bouleversants reçus par l’auteur au Congo et en Indonésie.
Les Téméraires. Quand la Bourgogne défiait l'Europe, de Bart van Loo (Flammarion, 2020), traduit en collaboration avec Daniel Cunin : pour tout ce que j’ai appris sur l’histoire de la Bourgogne et donc de la Flandre, ainsi que le talent de conteur de l’auteur et son humour.
Petit cœur, de Kim van Kooten (Calmann-Lévy, 2018), pour ce roman bouleversant sur un beau-père perverse, une mère dans le déni et une enfant agressée.
Pour conclure ce florilège, je terminerai par le livre le plus difficile que j’aie traduit : Contrepoint, d’Anna Enquist (Actes Sud, 2010). Dans ce court roman, l’auteure évoque la mort de sa fille en s’aidant de la musique, notamment des Variations Goldberg de Bach. Un livre magnifique où j’ai dû jongler entre des aspects très techniques musicaux et d’intenses émotions décrites tout en finesse et en discrétion.
Enfin, quel livre auriez-vous aimé traduire ?
On m’a proposé récemment de retraduire 1984 de George Orwell. Je n’avais pas le temps, mais j’aurais aimé me livrer à cet exercice avec mon fils Etienne, qui a de vrais talents de traducteur, même s’il a opté pour la musique. Il m’a d’ailleurs aidée à traduire le texte d’une chanson dans Petit cœur. La traduction de ce livre d’Orwell aurait été probablement très difficile mais la collaboration extrêmement intéressante.
Merci beaucoup Isabelle.
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